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aux vieillards, non. Sur tous ces plans, on les assimile aux aumône : charité
TRAIT D UNION une misérable aumône pour se sentir quitte envers eux. Cette TRAIT D UNION TRAIT D UNION
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adultes plus jeunes. Cependant, quand on décide de leur statut
économique, on semble considérer qu’ils appartiennent à une
se sentir/être quitte : être
espèce étrangère : ils n’ont ni les mêmes besoins ni les mêmes
libéré d’une obligation,
sentiments que les autres hommes s’il suffit de leur accorder
d’une dette
illusion commode, les économistes, les législateurs l’accréditent Marcel Proust (1871-1922) :
quand ils déplorent le poids que les non-actifs représentent pour écrivain français dont l’œuvre
les actifs : comme si ceux-ci n’étaient pas de futurs non-actifs et principale est À la recherche du
n’assuraient pas leur propre avenir en instituant la prise en charge temps perdu (1913-1927)
des gens âgés. Les syndicalistes, eux, ne s’y trompent pas : quand odieux : affreux, ignoble
ils présentent des revendications, ils font toujours une large part répugnant : dégoûtant,
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TRAIT D UNION les improductifs de manière que ceux-ci ne soient défendus TRAIT D UNION TRAIT D UNION
au problème de la retraite.
répulsif
3 Les vieillards qui ne constituent aucune force économique
auréolé : entouré d’une
n’ont pas les moyens de faire valoir leurs droits : l’intérêt des
auréole (cercle lumineux dont
exploiteurs, c’est de briser la solidarité entre les travailleurs et
les peintres entourent la tête
par personne. Les mythes et les clichés mis en circulation par la des saints)
pensée bourgeoise s’attachent à montrer dans le vieillard un autre. vénérable : très respectable
C’est avec les adolescents qui durent un assez grand nombre d’années radoter : répéter son point de
que la vie fait des vieillards, remarque Proust ; ils gardent les qualités vue de manière incohérente et
et les défauts de l’homme qu’ils continuent d’être. Cela, l’opinion confuse
veut l’ignorer. Si les vieillards manifestent les mêmes désirs, extravaguer : affirmer des
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TRAIT D UNION d’eux la sérénité ; on affirme qu’ils la possèdent, ce qui autorise TRAIT D UNION TRAIT D UNION
les mêmes sentiments, les mêmes revendications que les jeunes,
idées qui n’ont aucun sens
ils scandalisent ; chez eux l’amour, la jalousie semblent odieux ou
abjection : dégradation
ridicules, la sexualité répugnante, la violence dérisoire. Ils doivent
morale, indignité
donner l’exemple de toutes les vertus. Avant tout, on réclame
- métamorphose,
à se désintéresser de leur malheur. L’image sublimée qu’on leur avatar :
propose d’eux-mêmes, c’est celle du Sage auréolé de cheveux transformation
blancs, riche d’expérience et vénérable, qui domine de très haut - mésaventure, péripétie
la condition humaine ; s’ils s’en écartent, alors ils tombent en
dessous : l’image qui s’oppose à la première, c’est celle du vieux fou
REPÈRES
qui radote et extravague et dont les enfants se moquent. De toute Vieillesse et
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TRAIT D UNION le tourner contre nous-même : nous refusons de nous reconnaître TRAIT D UNION TRAIT D UNION
façon, par leur vertu ou par leur abjection ils se situent hors de
l’humanité. On peut donc sans scrupule leur refuser ce minimum
dépendance
qui est jugé nécessaire pour mener une vie d’homme.
Aujourd’hui, en France,
4 Nous poussons si loin cet ostracisme que nous allons jusqu’à
20 % de la population
Si l’espérance de vie
dans le vieillard que nous serons : De toutes les réalités [la vieillesse] a plus de 65 ans. Compréhension écrite
est peut-être celle dont nous gardons le plus longtemps dans la vie s’allonge, les années
une notion purement abstraite, a justement noté Proust. Tous gagnées ne sont pas
les hommes sont mortels : ils y pensent. Un grand nombre d’entre toujours synonymes de
eux deviennent des vieillards : presqu’aucun n’envisage d’avance bonne santé. Une partie
cet avatar. Rien ne devrait être plus attendu, rien n’est plus imprévu des personnes âgées seront
dépendantes et auront donc
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TRAIT D UNION surtout les jeunes filles, arrêtent la vie au plus tard à 60 ans. Certaines spécifique. En 2 020, il y a TRAIT D UNION
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que la vieillesse. Quand on les interroge sur leur avenir, les jeunes,
besoin d’une prise en charge
disent : Je n’irai pas jusque-là, je mourrai avant. Et quelques-unes
1,4 million de personnes
même : Je me tuerai avant. L’adulte se comporte comme s’il ne devait
dépendantes.
jamais devenir vieux. [...]
5 Au jour venu, et quand on s’en approche, on préfère d’ordinaire
la vieillesse à la mort. Cependant, à distance, c’est celle-ci que
nous considérons le plus lucidement. Elle fait partie de nos
possibilités immédiates, à tout âge elle nous menace ; il nous 253
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